La ronce, cavalerie des bois

Ronce

Une fois installée, il faudra bien se résoudre à utiliser ses mille vertus.

La brume se dissipe et dévoile l’orée d’une imposante forêt de chênes qui surplombe un grand pré. Eparpillés dans les graminées, des pommiers et des pruniers attendent avec frayeur l’assaut des bois.

Ce moment suspendu entre deux camps, chênes d’un côté et fruitiers de l’autre, semble durer des heures. Et puis tout à coup, la charge est lancée! D’imposantes lianes barbelée s’élancent entre les troncs pour jaillir de la forêt, telles des cavalier de terreur à l’assaut de l’herbe frémissante. Le sol crevé par d’innombrables grenades de mûres noires explose en vertes étincelles de lianes pointues. L’avalanche de ronces impitoyables et tortillantes dévale la pente à toute vitesse. Dans la prairie, les arbres domestiques sont submergés par cette marée feuillue gainée de méchantes piques. Impossible d’y résister. La forêt à son tour dévale le talus et pousse la ronce plus en avant vers les lignes ennemies qui fondent comme beurre au soleil. Les chênes lancent leurs fruits, aidés des frênes et des érables. Partout, de jeunes pousses se dressent prêtes à monter dans les airs pour dévorer quelques grains de lumière oubliés. Le pré se réduit comme peau de chagrin, tandis que la forêt gagne du terrain. Et puis plus rien. Du grand pré dégarni, il ne reste que quelques pommiers redevenus sauvages entre hêtres et aulnes à la mine sévère. La forêt à repris ses droits et la ronce poursuit au loin son oeuvre, sous les ordres de la sylve.

Patience…c’est un film d’auteur

Belle fresque guerrière n’est-ce pas? Venez, il reste quelques sièges au premier rang! En tant qu’humain, nous avons droit à la version longue de cette épopée fougueuse. Le mouvement à peine perceptibles des végétaux nous donne un sentiment d’immobilité et de calme, alors que sous nos yeux dupés se joue tout un drame. Autant dire que pour faire durer le pop-corn, nous devrons nous rationner. L’entracte est dans 15 ans. Alors, en attendant de voir bouger la ronce, je vous invite à un petit tour d’horizon sur le sujet.

Tête de pioche…

La ronce prépare le terrain pour l’arrivée des arbres. Envahissante et têtue, une fois installée, elle suivra son plan quoi qu’il arrive. Entre ses piques acérées, poussent de jeunes essences, amoureusement protégées des herbivores. Les biches et autres cervidés doivent se contenter de verdure déclassée, tandis que renards et sangliers en font un refuge de prestige contre tous dangers à deux pattes. Les petits oiseaux et autres rongeurs s’y installent, tous gâtés par l’opulente table de mûres et de chenilles juteuses offertes aux plus véloces gourmands. A qui ne craint pas les piques, la ronce sait se faire généreuse!

Sévère et nourricière

En divine pourvoyeuse des bosquets, elle nous offre ses jeunes pousses en confits, ses feuilles fermentées font un thé délicat, et bien entendu ses fruits se cuisinent en mille préparations goûteuses. Les nombreuses vertus médicinales et gustatives font de cette plante une bonne et robuste compagne de jardin. Les grosses tiges épineuses bien sèches feront d’excellents repousse-chats, une fois posées sur les planches de culture. Il faudra cependant cadrer la plante pour ne pas voir déborder ses tiges plus qu’il n’en faut. Ces longues et nombreuses lianes penchées se marcottent allègrement une fois qu’elles touchent le sol.

Mais que faire alors de toute cette verdure? Faisons donc, par exemple, de beaux paniers tressés avec tout le surplus annuel! Voilà une activité bien plus attrayante que les colliers de macaronis et autres bricolages en kit à tata!

A cette ronce piquante et maternelle, véritable Walkyrie des lisières sauvages, faisons une guerre nourricière. Les dards acérés contre la gelée sucrée, un deal équitable qu’on ne saurait refuser…

Ronce

Rebelle et nourricière

6 réflexions sur “La ronce, cavalerie des bois

  1. Les ronces ne donnent pas toutes des mures, si?
    J’ai longuement attendu de voir si la mienne finissait par produire des fruits en vain… Mais l’idée de les faire en tisane est à exploitée. Merci de ces infos.

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  2. Lol! Je savais que c’était un trésor ces ronces, mais je n’en savais pas autant! D’ailleurs, pourriez-vous en dire plus au sujet du confit de jeunes pousses, ainsi que sur les feuilles fermentées; auriez-vous de précieuses recettes?

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    • Bonjour,
      Pour les jeunes pousses, il faut les peler et ça se mange cru ou préparé comme des asperges (cuites à l’eau). Vous pouvez aussi en faire des conserves, comme les courgettes 😉
      Pour le thé, il faut laisser flétrir les feuilles à l’ombre et selon vos goûts 1-10 jours de fermentation. Elles doivent être empilées en couche épaisse. J’ai vu que certains laissent carrément moisir la première couche… mais je ne suis pas allé jusque là 🙂

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